CONGES PAYES ET MALADIE NON-PROFESSIONNELLE, ATTENTION : PROVISIONNEZ !

image congésL’Etat français condamné pour ne pas avoir transposé la directive « Temps de travail » !

Le 6 avril 2016, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné l’Etat français à la réparation du préjudice issu de la perte de jours de congés payés pour un salarié dont le contrat avait été suspendu en raison d’une maladie non-professionnelle.

On pourrait croire que cette décision ne relève que de la classique occurrence de la défaillance de l’Etat dans la transposition des directives. Mais à y regarder de plus près, cette décision atteint les fondements mêmes de notre droit social en matière de congés payés.

Aujourd’hui, en droit français, la rémunération du salarié est fonction de son temps de travail effectif, définit comme la période pendant laquelle le salarié effectue une prestation de travail pour le compte et sous la subordination de l’employeur (articles L.3121-1 à L.3121-9 du Code du travail).

Exceptionnellement, certaines périodes au cours desquelles le salarié n’est pas à la disposition de l’employeur sont assimilées à du temps de travail effectif pour la détermination du droit à congés payés. Il en est notamment ainsi des absences consécutives à un accident de travail ou à une maladie d’origine professionnelle (article L.3141-5 5°).

La logique du temps de travail effectif comme facteur déterminant du droit aux congés payés est donc ici déviée, mais au seul profit des suspensions du contrat de travail pour accident ou maladies d’origine professionnelle.

Or le droit de l’Union européenne ne l’entend pas ainsi, et le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 6 avril 2016 entend bien nous le rappeler …

L’article 7§1 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 impose en effet que « les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines ».

De son côté, la CJUE a expressément rappelé que l’application de cette directive interdisait d’établir la moindre distinction entre les salariés en situation de maladie et ceux qui ont effectivement travaillé (CJUE, 24 JANVIER 2012, aff. C-282/10 DOMINGUEZ).

A fortiori, aucune distinction ne peut donc être faite selon l’origine de l’absence pour maladie … tout salarié arrêté pour maladie, que celle-ci soit ou non d’origine professionnelle, doit dès lors bénéficier d’au moins quatre semaines de congés payés !

Faute de transposition interne, la directive européenne ne peut faire naitre aucune obligation à la charge de l’employeur.

C’est donc l’Etat que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné à indemniser le salarié pour la réduction de son droit à congés payés à une durée inférieure à 4 semaines (en l’occurrence, 485 € pour les 6,5 jours de congés payés qui lui manquaient, du fait de son arrêt maladie, pour arriver au minimum de 4 semaines).

Il s’agit, certes, d’une simple décision de première instance susceptible de recours. Il n’empêche que dans le contexte de réforme, elle met l’accent sur une non-conformité avec le droit de l’Union européenne qui pourrait impliquer un changement notable dans la prise en charge des congés payés par l’employeur. Dès lors un conseil prudent s’impose : provisionnez !

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